rencontre Jeunes agris/cédants organisée par l' équipe CMR du Valenciennois

Quand une équipe CMR d'agriculteurs propose d'ouvrir plus largement les questions que quelques uns se posent à propos de leur succession pour en faire une sorte de café-débat...

rencontre Jeunes agris/cédants organisée par une équipe CMR,

Ce mardi 7 mars 2023 à Bermeries (au gite le pigeonnier, 12 rue Roisin),il y avait une trentaine de personnes , moitié cédants, moitié jeunes. C’était un superbe résultat pour cette tentative de rencontre peu ordinaire car souvent en rural ,on parle peu des cessions, comme partout parler d’argent n’est pas dans les habitudes, et c’est plutôt tabou…

La soirée était animée par Amelie Lefebvre-Chombart (coordinatrice de la chaire ESS depuis 2015 à l’université de Valenciennes)

Le déroulement proposé était le suivant :

A. Dites sur un post-it ce que vous êtes venu chercher à la réunion

B. 3 témoignages (1 cédant en transmission, 1 jeune agri repreneur avec asso. De préfiguration, 1 jeune agri reprenant la ferme familiale)

C. Un temps d’échanges par table (il y avait 4 tables de 8 personnes environ)

Introduction par Amélie :

-Transmettre est compliqué en général que ce soit culturellement, en famille, ou au niveau économique… Il faut déjà savoir ce que l’on a envie de transmettre, pour certaines choses on le désire plus ou moins (par exemple , en agriculture la dette symbolique peut être lourde).

En agriculture, si l’on remonte un peu dans le temps, c’était dans la famille, et plutôt à un couple…aujourd’hui il y a l’arrivée des néo-ruraux, et le sujet de l’agrandissement des surfaces .En 50 ans, ¾ des exploitations ont disparu. Avant la transmission était exclusivement masculine ,aujourd’hui il y a quelques femmes mais très peu.

Tout passage de A vers B nécessite une translation, un etat de changement qui n’est pas facile à vivre, un entre-deux peu confortable.

Le Nooord!... De plus la situation géographique, en agriculture est très importante. Nous sommes avec des caractéristiques correspondant au Nord de la France, région très peuplée et très urbanisée, ce qui n’est pas sans interactions sur le rural, que ce soit pour la vie ,le travail, la mobilité …il y a des sources de conflits potentielles.

Nous sommes aussi à un tournant, peut être,en 2023, si on se réfère au livre : « une agriculture sans agriculteurs » de Bertrand Hervieu et François Purseigle  ou au constat du syndicat des jeunes agriculteurs sur la politique agricole commune qui était nous sommes « des fermes pas des firmes » !

La transmission en agriculture est d’autant plus difficile que liens professionnelsq et liens familiaux sont souvent melés et que la rupture des uns peut entrainer la rupture des autres : le fait de rompre entrainera une rupture des deux côtés, d’où il ressort une problématique de liberté…

Notre rencontre permettra de discuter de ces sujets  en tentant de répondre ou au moins d’échanger sur des questions telles que : -est-on obligé de transmettre ? Quelles sont les attentes des repreneurs ? A-t-on envie de reproduire ce qui a été fait ?

A-Les remarques sur post-it ont tourné autour de 3 désirs : -être conseillé, -mieux connaître les attentes des jeunes,-échanger.

B-Les témoignages :

  1. Une exploitante en cours de transmission. En 1988, la ferme familiale avait 25 vaches laitières, elle a aidé son fils et un neveu à s’installer à 16 kms pour une exploitation de poules pondeuses bio. La grosse différence est qu’auparavant « on travaillait pour vivre et c’était bien » ; maintenant on est passé d’independant à une société puis à une GAEC puis PDE, en bio, autre société nécessaire, et puis pour avoir des aides ,il faut rentrer dans des case » : c’est beaucoup de tracas juridiques et cela coute cher…on pense toujours avoir abouti et il y a toujours du neuf (des normes etc..). Ce qui m’a marqué durant toute cette période ,ce sont les coups de main reçus des uns et des autres (une CUMA a été créée.. ). On trait toujours du lait et on en vit et cela est un point positif, mais les montants d’investissements augmentent tout le temps et on devient des gestionnaires.
  2. Un jeune repreneur (dont les parents étaient déjà en société avec une personne non-agriculteur) témoigne : C’était une GAEC ,elle est en dissolution car il y a restructuration de la ferme. Avec mon frère et d’autres jeunes, nous reprenons la ferme en répartissant les activités : Mon frere Matthieu, pour l’élévage, un ami Quentin pour le verger, moi pour le maraichage et il a aussi 2 salariés. Il y a des néo-ruraux avec nous.

"Je me rend compte que la gestion administrative est difficile, mais on s’est entouré et une asso.de préfiguration a été faite depuis 3 ans (avec tous ceux qui ont envie de reprendre la ferme) ; le collectif permet de garder une certaine liberté au niveau des contraintes de temps sur la vie personnelle. Notre démarche est de créer une vision commune."

     3. Un jeune agri et son frère sur une ferme familiale : après avoir travaillé au contrôle laitier et dans une entreprise de materielss agricoles, j’avais eu l’opportunité de reprendre une porcherie et cela ne s’est pas fait, aujourd’hui j’ai l’occasion de reprendre la ferme de mon père  (80 vaches,60 truies) avec le projet d’engraisser des cochons. "Le plus dur dans la transmission (on est 3 frères), c’est pour celui qui n’est pas dans la ferme"…

 

 

C. discussions par tables à partir de ces témoignages et des vôtres pour répondre à la question :

CE SERAIT QUOI,UNE BONNE TRANSMISSION ? (1/4 d’h jusque 21h20)

Sur table n°1 :

-il a été dit que les cédants doivent préparer leur cession (les cédants devraient honorer leur pré-engagement, ex : ne pas vendre une partie des terres avant la reprise par un jeune qui se retrouve avec bâtiments et matériel sur moindre surface). Au niveau des banques, elles ne se mouillent pas (hypothèque, caution, matériels…sans mon aide ,mon jeune ne pourrait rien faire) même avec une bonne comptabilité et une bonne solvabilité, elles trouvent toujours un problème conjoncturel…par ailleurs, il faut que le jeune ait bien travaillé son projet. C’est au début de la transmission que c’est le plus dur ! Il faut savoir que la vie en agriculture sera faite de renoncements et qu’en plus la mise de fonds est rude, c’est donc un choix de vie, de vie de couple et de vie de famille à faire nécessairement. Il faut des passionnés en agriculture ! (Grippe aviaire, contrôles stricts, facture d’engrais, brucellose, impondérables…) . Mais en plus, dans le Nord, le foncier est un vrai problème, trop de fermes partent pour l’agrandissement (de grosses firmes agroalimentaires deviennent propriétaires)-continuer sur la ferme ou vendre les terres devient un vrai cas de conscience !

Sur table n°2 :

-il s’agit de transmettre un outil viable (attention aux investissements).Il est important de planifier pour éviter les conflits. Quand le cédant part en retraite, son pouvoir de décision doit diminuer sinon cela pose problème, ce n’est pas possible. La transmission suppose que cela soit progressif dans le temps. Quand le jeune s’est installé avant que le cédant parte, cela suppose qu’il paie le futur retraité. Il y ale problème de la qualité de vie à soulever : en couple ,ou non, enpour la famille, il faut faire des choix, et en être conscient. Quand la cession, se passe avec quelqu’un d’étranger à la famille, au moins il y a moins de risques de conflits familiaux .

Sur la table n°3 :

Deux choses nouvelles ont été abordées par rapport aux idées déjà exprimées : savoir faire le choix de quitter un lieu géographique  pour un autre, et ouverture aux idées nouvelles qui doit forcément se faire côté cédant.

Sur la tablen°4 :

Il n’existe pas 2 fermes pareilles donc attention mais aussi espoir. Il faut faire au statut du jeune en transmission (bénévole ?non, aidant ? non…). Attention aussi à l’orientation parfois trop forte des parents. Le dialogue entre jeunes et futurs retraités n’est pas toujours facile mais il est important de se dire les choses, il ne faut pas que des conflits couvent et il vaut mieux une bonne explication qu’un mutisme qui ressortira à un moment ou à un autre. Le point très positif des jeunes est leur adaptation aux outils de gestion informatiques.

Discussion générale :

Le problème de l’argent est tabou or cela est à mettre au clair pour que les autres enfants ne se sentent pas floues mais cela nécessite forcément une explication technique. (pour que notre fils réalise l’importance des fluctuations et du travail, on lui a d’abord donné un salaire et un pourcentage sur l’exploitation). Attention à la valeur de cession qui n’est pas la valeur économique (mais quand on cède à son enfant ,on a envie qu’il puisse gagner sa vie avec ce que l’on lui vend).

Attention,si c’est trop bon marché, cela peut revenir à trop le privilégier vis-à-vis d’autres. (Nous avons fait estimer le prix par un expert, et la banque impose une donation).

Les investissements doivent correspondre aux attentes des jeunes.

Remarque : certains partenaires extérieurs comme « terre de liens » peuvent aider (cela permet de déconnecter la valeur du bien de l’outil de travail) .la location est plus facile que l’accession. Et il existe aussi avec les chambres d’agriculture ,des parcours à la transmission.

Question : savoir si l’on veut vendre un outil de travail hyper cher (en vendant à l’agrandissement) ou pour les jeunes, estimer une transmission à un prix juste… (c’est sûr que le prix à l’ha augmente).

On remarque que le coopératif fonctionne quand il y a beaucoup d’investissements (mais il y a un blocage au niveau des lois, et en agriculture ce n’est pas encore évident…)

Des grosses centrales comme Auchan ,Carrefour…achètent beaucoup de terres en ce moment.Ils veulent rendre la profession « salariée » du groupe…alors attention !

FIN Et Temps CONVIVIAL : crêpes, jus de pommes, bières !

 

Info : Initiatives paysannes a proposé un spectacle.Mardi 14 mars à 14h à Landrecies :

 « Elle va devenir quoi,ma ferme ? »

 

S.M

 

 

 

 

Article publié par cmr • Publié le Vendredi 28 avril 2023 - 15h24 • 357 visites

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